Pourquoi c’est si dur d’émerger et publier en étant écrivain neurodivergent?

Le monde de la publication de livres est assez normatif. En conséquence, tout ce qui sort d’une certaine norme a plus de mal à être publié. C’est la raison première. La neurodivergence c’est hors norme donc ce n’est pas ce que les gens qui publient cherchent en priorité. C’est moins un problème en auto édition mais pour ce qui est de l’édition traditionnelle comme c’est hors des cases habituelles et donc un risque pour les affaires c’est peu recherché. Par les éditeurs s’entend. Par le public des lecteurs eux mêmes neurodivergents par contre les récits de concernés en fiction dispo en librairie ils en veulent et en demandent en fait ils ont même hâte qu’il y en ait plus. Il y a là un vrai public. Le problème bien sur c’est que le démarchage d’éditeur dans l’édition traditionnel demande de grosses capacités à réseauter et des capacités sociales et de communication importantes pour convaincre. Avec énormément de règles sociales implicites déjà quasi impossibles à décoder même pour la plupart des écrivains neurotypiques. Autant dire que pour la minorité d’écrivains neurodivergents c’est l’enfer de déchiffrer cette forêt incertaine de messages cryptiques des éditeurs.

C’est très lent, pénible, douloureux et décourageant de faire face à tout ça. Beaucoup abandonnent en cours de route et plus de neurodivergents que de neurotypiques parce que pour nous c’est plus dur de piger tout ça. En plus la plupart des écrivains neurodivergents sont plutôt des écrivains en imaginaire. Avec toute la difficulté de trouver les gens qui font ce type de livres à l’édition de plus, et le mépris des gens qui supportent pas la littérature de genre et la littérature jeunesse à laquelle elle est souvent associée en prime à se fader. Plus le fait de devoir naviguer dans tout ça avec l’obstacle des problèmes de fonctions exécutives. Et aussi publier surtout en édition traditionnelle mais même en autoédition c’est pas gratuit c’est même très cher. Et la plupart des écrivains neurodivergents sont handicapés vivent de l’AAH et sont sous le seuil de pauvreté donc…et en conséquence n’ont pas autant d’argent que l’immense majorité des auteurs français qui sont des bourgeois pour tenter de publier leurs livres.

Tout ça est en plus très anxiogène et joue avec douleur sur la santé de beaucoup d’auteurs neurodivergents faisant leurs premières armes qui sont nombreux à avoir des troubles anxieux que ce processus renforce. Pour certains tant et si bien que ça les conduit à abandonner. Aussi souvent les éditeurs exigent que leurs écrivains aient un bon réseautage de plateformes et réseaux sociaux sur le net pour faire leur pub et beaucoup de neurodivergents en sont inaptes. Ces éditeurs vont donc les repousser.

Enfin bien sur très peu de gens qui publient et éditent des livres sont neurodivergents sauf que nous on l’est donc nos textes et personnages le reflètent et comme ils sont NT ceux qui décident dans quels livres ils ont envie d’investir du capital car ils les apprécient ils choisissent pas les nôtres en premier vu qu’ils ne s’y retrouvent pas ne comprenant pas nos expériences et points de vue et donc n’aiment pas ce qu’on écrit en général.

Quelles solutions donc? Idéalement dans le futur changer les structures systémiques et systèmes de valeurs dénigrant nos récits, rendent normalisé dans le milieu de l’édition française à propos des récits sur la neurodivergence le rien sur nous sans nous (là on est à des kilomètres de ça pour l’instant) et les victoires globales des milieux progressistes pour plus de variété dans le monde des auteurs publiés mais bien sur tout ça c’est des changements de fond long impossible maintenant de suite même si on doit pas lâcher cet objectif.

Dans l’immédiat par contre il y a tester des solutions contre les problèmes de fonction exécutives et les aides pour l’anxiété (pour les gens qui en trouvent sur qui ça marche) en premier lieu qui est le plus simple pour améliorer ses chances de publier, ouais c’est dire si c’est dur le reste. Y aller en mode nekketsu et persévérer à fond jusqu’à passer pas loin de harceler les éditeurs jusqu’à ce qu’ils cèdent et vous publient (mais discrètement sinon ça se voit et ils te blacklistent et là t’as plus aucune chance pour l’édition traditionnelle), qu’on publie ou pas demeurer fier d’être un auteur neurodivergent assez bon pour avoir pu l’envisager et l’essayer en dépit des obstacles et encourager le plus de gens comme nous possible d’écrire eux aussi. Si vraiment au bout de 100 tentatives différentes rien n’a marché (ou avant si on cesse de trouver ça possible avant pour des raisons économiques, sociales ou de santé) on se tourne vers l’auto édition. Et si là aussi ça fonctionne pas on oublie la publication et écrit pour soi mais on arrête pas et on diffuse des histoires non validistes auprès d’une communauté d’autres personnes neurodivergentes qui ont besoin de les entendre en contre bande en quelque sorte. Au pire on continue à blogger ou à échanger des petites histoires avec les gens qu’on aime bien avec d’autres personnes neurodivergentes. Voilà.

5 réflexions sur « Pourquoi c’est si dur d’émerger et publier en étant écrivain neurodivergent? »

  1. Et justement, je me demandais, tu en penses quoi?

    J’hésite entre deux histoires à raconter :

    1) L’une raconte l’histoire d’un jeune banlieue devenu acteur star qui a reçu tous les prix et qui a connu ensuite une période sombre où il est devenu SDF .Il rencontre une réalisatrice de cour métrage qui décide de lui donner une nouvelle chance.

    2) l’autre raconte l’histoire d’une jeune française polynésienne, dysphasique sévère, qui est témoin d’une violence policière, et qui décide de filmer la scène. Elle est arrêtée, subit une garde à vue, et finit par s’engager et filmer les scènes de violence policière mais elle a du mal à s’exprimer et à s’orienter dans le temps et l’espace.

    Je voulais avoir ton point de vue et l’inscrire dans mon recueil de nouvelles ❤

    Aimé par 1 personne

    1. Mon point de vue c’est que quand on hésite entre deux histoires à écrire on commence et on voit celle qui nous sort du stylo le plus spontanément au fil des pages. En général c’est celle qu’on tient le plus à raconter donc c’est la meilleure.

      Sinon pour la question de la publication les éditeurs généralistes c’est mort mais les éditeurs de moins grande envergure qui ont une spécialisation sont plus abordables faudrait voir si l’ensemble de tes textes ont pas un genre de point commun récurrent ne correspond pas à une recherche possible de certains éditeurs spécialisés et tenter le coup par cette porte.

      Par exemple si tu tiens à écrire des histoires avec une forte veine sociale faudrait voir du coté des éditeurs militants.

      Aimé par 1 personne

  2. C’est tellement vrai, mais mon neuropsy est tellement enthousiaste mais l ne comprend pas les enjeux de la neurodivergence, beaucoup de gens croient au monde de l’édition. Le pire c’est qu la plupart des génieslittéraires consacrés sont clairement psychodivergents(beaucoup de cas de bipolarité et de schizophrénie, et des cas d’autisme mais c’est dur les diags rétroactifs). Bref, normalement , avoir du talent c’est être hors norme, mais les éditeur;ices détestent la littérature depuis bientôt un siècle c’est pourquoi 90 pcts des auteurices publi.es sont très nul.les, et que la littérature s’est dégradée.

    J’aime

    1. Bah perso j’ai fini par trouver des gens qui veulent bien test de m’éditer et me tenter en librairie (à des tirages ridicules mais bon ça me va pour un début surtout que c’est très artisanal leur méthode). Je les aient principalement trouvés car des amis ou de la famille ont fait les démarches neurodivergence incompatible pour moi. Du coup je contes finir mon bouquin d’ici le bout de l’année et l’amener à l’édition/la publication en tant que court roman fantasy premier roman de jeune autrice d’imaginaire dans le courant de Noël prochain. Notamment par un hasard fou qui veut que ma tante a tapé dans l’œil d’un libraire pas mal réseauté il en est fou tout ce qu’elle demande il dit oui et donc voilà. Du coup j’aurais tendance à considérer au final qu’en ce qui me concerne le chemin de la publication semble tenir principalement de l’opération séduction (et des jeux de l’amour et du hasard visiblement comme dirait Marivaux ou alors c’est les offrandes à mes dieux je sais pas en tout cas un truc a marché à force de pousser et de gueuler par tout ce que je voulais ça c’est mis en place apparemment).

      Aimé par 1 personne

    2. Mais oui sans ça c’était impossible les éditeurs standards c’était mort. C’est clair. Dans la littérature généraliste c’est une cata. Genre j’avais bien tout lissé que ça rentre dans les clous normé au plus que je pouvais…l’écrit est refusé car j’ai fait l’erreur de placer le texte dans une autre région que l’ile de France et l’éditeur au retour de lettre disait ne pas arriver à s’identifier parce que les persos n’étaient pas des parisiens comme lui et la majorité de ses lecteurs. Celle là je l’ai pas vu venir sacrée claque.

      Du coup je me suis renseignée et en effet à part les éditions indé et celles volontairement régionalistes la plupart ont ce fonctionnement ou tout ce qui ne part pas d’un prisme parisien les dérange et finit à la poubelle apparemment dans les grandes éditions/éditions généralistes (à moins peut être de suivre leurs codes comme des parisiens établis en province ça je ne sais pas). Merde. C’est ça la littérature « française »? Mais bordel! Paris n’est pas la France et la plupart des français vivent ailleurs notamment dans les villes moyennes de diverses provinces croient t’ils donc qu’hors de Paris on ne lit pas et que dès qu’on voit un bout de verdure ou sort du périph’ c’est plus la France (sans même parler de l’outre mer et des écrivains qui publient en France en français depuis d’autres pays). La clairement ça a été le coup de grace qui m’a décidée a divorcer de toute tentative d’édition en généraliste qui publie surtout de la blanche.

      Heureusement en spé imaginaire les éditeurs et les gens qui publient je l’ai vite perçu en m’y penchant un peu ont beau avoir aussi leurs limites ils sont quand même beaucoup moins chiants et obsolètes dans leur vision de ce qui est bien à lire et écrire.

      D’ailleurs de toutes les façons à toutes les époques les meilleurs auteurs n’ont jamais respecté les règles académiques donc on se torche avec. Oui.

      J’aime

Laisser un commentaire